Cet été nous avons dû répondre rapidement à un projet d’examen initié par la ministre des sciences du Canada, madame Kirsty Duncan, concernant le financement et le soutien aux sciences fondamentales. La production d’un mémoire s’avérait incontournable afin de décrire les enjeux de la recherche fondamentale tels qu’ils se présentent pour les professionnelles et professionnels de la recherche (PPR) au Québec.
Comme vous le savez sans doute, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) sont les trois organismes subventionnaires fédéraux qui appuient la recherche, la formation en recherche et l’innovation dans les établissements postsecondaires du Canada. Plus précisément, leur mission est de fournir un appui (soutien financier) aux étudiants, au corps professoral et aux établissements.
Deux contraintes majeures font actuellement obstacles au soutien des carrières scientifiques de recherche dans les universités canadiennes et à l’emploi du personnel professionnel de recherche (non-étudiant) dans le cadre des programmes de financement des trois organismes.
La première contrainte structurelle est liée au mandat même des organismes subventionnaires fédéraux, à savoir le soutien orienté uniquement vers les étudiants des cycles supérieurs, les stagiaires postdoctoraux et les professeurs-chercheurs des établissements. En fait, dans les différentes orientations des plans stratégiques des trois organismes subventionnaires (Plan stratégique du CRSH à l’horizon 2020, Plan stratégique de 2020 du CRSNG et Plan stratégique quinquennal IRSC) pour les prochaines décennies, il n’est fait mention nulle part de soutien au personnel de recherche hautement qualifié dans les universités.
La deuxième contrainte structurelle est liée aux contraintes administratives qui découlent du mandat des organismes et à l’utilisation que peuvent faire les titulaires d’une subvention des fonds qu’ils reçoivent. En effet, les programmes de financement du CRSH et du CRSNG, y compris ceux des Chaires de recherche du Canada, bien qu’ils autorisent les dépenses en salaire pour du personnel de recherche non-étudiant (dans la rubrique « autre »), limitent leur embauche à des tâches de coordination très précises et qui doivent être fortement justifiées dans les demandes de subvention. Il s’agit là d’une contrainte financière majeure pour les chercheurs, car faute de personnel qualifié et expérimenté, il n’est pas rare que ces derniers utilisent n’importe quel autre fonds disponible pour payer le salaire d’un PPR pour travailler sur des projets de recherche financés par le fédéral.
Afin de dénoncer ces deux contraintes majeures aux carrières en recherche universitaire, nous avons élaboré le mémoire autour de trois volets principaux. D’abord, une description de qui nous sommes et de notre rôle primordial en recherche universitaire. Une section qui a été alimentée par les résultats de l’étude panquébécoise sur les PPR. Ensuite, se basant sur les données recueillies dans notre étude pancanadienne sur les PPR (en rédaction), brosser un tableau comparatif entre nos enjeux et ceux de nos collègues œuvrant dans les provinces hors Québec. Finalement, mettre en lumière ce qui doit être amélioré et la manière d’y parvenir par le biais d’une série de recommandations.
Nous croyons que la mission des organismes subventionnaires fédéraux doit plus que jamais inclure le soutien aux carrières scientifiques de recherche dans les universités canadiennes et favoriser le maintien en emploi du personnel de recherche hautement qualifié dans les établissements. Dans ce mémoire, nous proposons une nouvelle approche fondée sur la reconnaissance d’équipe où chaque acteur (professeur-chercheur, professionnel de recherche, étudiant, stagiaire postdoctoral ou autre) est reconnu pour sa contribution au projet de recherche. Pour ce faire, les programmes de financement des organismes subventionnaires doivent permettre de payer spécifiquement le salaire des professionnels de recherche. En ce sens, le mandat des organismes subventionnaires fédéraux se doit d’être élargi pour inclure le soutien au personnel de recherche et aux carrières de recherche universitaire (autre que professeur) pour traduire la réalité concrète de l’organisation du travail dans la recherche universitaire au Canada.
Nous vous invitons à prendre connaissance de notre mémoire sur l’examen du soutien fédéral aux sciences dont le titre est : «Reconnaître la contribution des professionnels de recherche dans le soutien fédéral aux sciences» et que nous avons soumis au comité consultatif mandaté par la ministre Kirsty Duncan.
En juin 2016, la ministre des Sciences, l’honorable Kirsty Duncan, lançait un examen indépendant du financement fédéral aux sciences fondamentales. Le mandat de cet examen a été confié à un Comité consultatif chargé de mener de vastes consultations partout au Canada auprès des différents milieux de la recherche et solliciter l’avis des divers intervenants concernés, y compris la société civile et le grand public. Les questions globales auxquelles doivent répondre les membres du Comité sont :
- Existe-t-il des lacunes touchant l’ensemble des programmes du système canadien de financement de la science fondamentale sur lesquelles il faut se pencher?
- Y a-t-il dans d’autres pays des éléments ou des programmes particuliers qui pourraient aider le gouvernement du Canada dans ses efforts visant à remédier à ces lacunes?
Luc Caron,
Président SPPRUL-CSQ